Cette personne a réalisé que
l'urgence était de trouver un lieu d’accueil pour ces jeunes. Elle
a téléphoné aux Missions Africaines (SMA) aux Cartières pour
présenter le problème. Aussitôt les pères sont partis les récupérer
en voiture et une salle a été disposée avec matelas et couvertures
pour bien les accueillir. C’est ainsi qu'a commencé l’accueil des
migrants aux Cartières.
Pour faciliter cet accueil bien
vite est né le projet de construction de deux chambres séparées et
autonomes. La nourriture était en charge des SMA. Ceci pendant
trois ans. Depuis Avril 2022 une convention est passée entre le SMA
et le département du Rhône. Une chambre est mise à la disposition
pour accueillir jusqu’à cinq personnes. La maison fournit les
draps, les serviettes de toilette, et, grâce à la convention, les
repas et les produits d’hygiène. Outre ceci, ces migrants trouvent
aussi ce qui est important: la sécurité, le confort, et quelqu'un
qui se soucie d'eux...
Les migrants qui nous sont envoyés
pour quelques jours et quelques nuits, ont chacun leur histoire qui
commence dans leur pays, leur famille et leur communauté. Elle se
poursuit alors qu’ils se dirigent vers le nord, après avoir
traversé le désert, la mer. Ils ont été témoins de violence, voire
de morts, au cours de leur voyage. La plupart d’entre eux ont été
battus à un moment donné, emprisonnés ou même violés. Beaucoup ont
un ami, un frère, une sœur ou un oncle avec qui ils voyageaient
dont ils ont été séparés, sans savoir s’ils sont encore en vie
quelque part, ou au fond de la Méditerranée, ou dans une prison
dans un pays…
Les différentes histoires sont illimitées. Ce n’est pas à nous d’en
déterminer la véracité. Ce n’est pas à nous non plus de juger s’ils
ont réellement 15 ans ou, si en fait, ils en ont plutôt 23. Peu
nous importe que leur famille ait trouvé les milliers d’euros
nécessaires pour payer un passeur, ou qu’ils aient réellement
voyagé avec un membre de leur famille ou un voisin. Ils ont payé
leur voyage en s’arrêtant souvent pour passer quelques jours,
semaines ou mois ici ou là pour gagner l’argent nécessaire pour la
prochaine étape. Peu nous importe que Lyon ou Chaponost soient leur
première étape en France et leur première tentative de demande
d’accueil des mineurs, ou qu’ils aient déjà tenté les démarches
sans succès ailleurs en France.
C’est au département du Rhône de statuer. Quant à nous, nous
pouvons seulement décider de la manière de les accueillir comme
êtres humains, qui sont souvent, comme nous le recommande le pape
François d’aller aux périphéries, vers les marginaux et les plus
petits d’entre nous. Ils sont ici avec nous pour quelques jours et
notre mission aux Cartières est de faire, au mieux, qu'ils se
sentent les bienvenus, soignés et en sécurité.
Ce qui est important, quel que soit leur âge ou la raison de leur
présence ici, est qu'ils ont l’opportunité de se sentir en
sécurité, de se reposer, de manger et de satisfaire leurs besoins
fondamentaux.
Ces jeunes, dont l’avenir est inconnu, sortent souvent d’une
expérience douloureuse. Leur avenir est entre les mains des autres.
Ceux qui restent plus d’une nuit ou deux aux Cartières en profitent
pour se reposer et commencer à se sentir à l’aise. Mais l’anxiété
les gagne à la pensée de ce qui les attend: Seront-ils acceptés en
tant que mineurs ? Ou seront-ils refoulés, et devront-ils faire
appel au tribunal de Lyon, tout en continuant de naviguer dans le
système d’hébergement, de nourriture, d’éducation, et d’éviter les
industries de la drogue et du sexe ? Ou devront-ils passer à autre
chose pour réessayer dans une autre ville ou un autre pays ?
Qu’ils aient 15 ou 23 ans, ces
jeunes ont vécu des situations tragiques, ils ont affronté des
décisions impensables qui bouleversent leur vie, auxquelles
beaucoup d’entre nous n’aurons jamais à faire face personnellement
quel que soit notre âge. Si pendant quelques jours ces jeunes
peuvent se sentir en paix, savoir que quelqu’un s’intéresse et
veille sur eux, que leurs besoins sont satisfaits, lors de leur
passage aux Cartières, alors nous pouvons penser que notre mission
est atteinte.
Steve
Phillips
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